Affaire Robert Latimer : le meurtre par compassion d’un pere qui a bouleverse le pays

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Le 16 novembre 1994, a Battleford, en Saskatchewan, Robert Latimer est reconnu coupable de meurtre sans premeditation de sa fille de 12 ans lourdement handicapee, Tracy Latimer.

Il y a 25 ans, Robert Latimer, un fermier de la Saskatchewan, est condamne a la prison a vie sans possibilite de liberation conditionnelle avant dix ans pour avoir tue sa fille lourdement handicapee, Tracy Latimer. Retour en archives sur cette histoire qui a anime les debats sur l’euthanasie et le suicide assiste.

« Voici le denouement d’une histoire tragique, delicate, ou il n’est pas facile de faire la part des choses. »

— Une citation de Bernard Derome, journaliste animateur

C’est en ces mots que l’animateur Bernard Derome presente le verdict de condamnation a vie de Robert Latimer.

Le 16 novembre 1994, a Battleford en Saskatchewan, l’homme est reconnu coupable de meurtre sans premeditation de sa fille de 12 ans, gravement handicapee depuis sa naissance.

Telejournal, 16 novembre 1994

La journaliste Eugenie Francoeur presente au Telejournal, le bilan de l’histoire.

Tracy Latimer, une vie de souffrance

Robert Latimer a toujours plaide avoir enleve la vie a sa fille pour la soulager de ses douleurs.

Tracy Latimer est atteinte de paralysie cerebrale depuis sa naissance. Elle ne peut ni parler ni se deplacer. Elle ne mange pas seule et est confinee a un lit ou a un fauteuil. Elle fait souvent des crises en raison de ses douleurs.

La fillette a deja subi une operation du dos ou on lui a installe des tiges de metal afin de redresser sa colonne vertebrale. L’intervention a dure huit heures. Il faudra un an a l’enfant pour recuperer.

Tracy Latimer doit egalement subir une autre intervention pour regler un probleme de hanche disloquee qui la fait souffrir. Pour cette intervention les medecins devaient lui installer une sonde pour la gaver et lui enlever l’os de la cuisse. C’en est trop pour son pere, qui y voit une « veritable mutilation ».

Le 24 octobre 1993, alors que ses trois autres enfants et sa femme sont partis a l’eglise, Robert Latimer immobilise Tracy a l’avant de son camion et relie un tuyau du pot d’echappement a la fenetre du vehicule. Il laisse le moteur tourner. Tracy meurt des suites d’un empoisonnement au monoxyde de carbone.

Le pere replace ensuite Tracy dans son lit pour faire croire qu’elle est decedee dans son sommeil, mais apres l’autopsie, les autorites decouvrent la verite. Latimer avoue avoir mis fin aux souffrances de sa fille, mais refuse de dire qu’il l’a assassinee. Pour lui, ce n’est pas un meurtre, mais un acte de compassion.

« Je croyais que ce serait mieux si je mettais fin a ses souffrances. Honnetement je ne crois pas avoir commis de crime. »

— Une citation de Robert Latimer

Un jury qui s’en tient a la loi

« Ce matin, le juge avait demande aux jures de faire abstraction de toute compassion et de s’en tenir aux faits. »

— Une citation de Bernard Derome

Apres cinq heures de deliberation et apres avoir demande a deux reprises au magistrat la difference entre un meurtre premedite et un meurtre non premedite, les jures ont conclu que Latimer n’avait pas planifie son geste longtemps a l’avance.

Le juge Ross Wimmer condamne Robert Latimer a une peine de prison a vie sans possibilite de liberation conditionnelle avant dix ans.

La femme de Latimer, Laura, fond en larmes a l’annonce du verdict, qu’elle trouve injuste.

Randy Kirkham, le procureur de la Couronne, se dit soulage. Pour lui, « une personne ne peut disposer a son gre de la vie d’une autre. »

L’avocat de la defense exprime sa deception quant au fait que les jures n’ont pas retenu la these du suicide assiste. Mark Brayford portera la cause en appel.

Quand la justice des hommes est plus tolerante que celle des tribunaux

En attendant le resultat de l’appel, Robert Latimer obtient la permission de retourner a Wilkie, en Saskatchewan, ou il demeure.

Le Point, 15 fevrier 1995

Le journaliste Benoit Giasson se rend dans le village de Wilkie. Son reportage est diffuse au Point le 15 fevrier 1995.

Plusieurs habitants de la communaute trouvent la sentence trop severe. Des voisins organisent un fonds special pour assumer les frais d’avocats. D’autres font circuler des petitions pour demander au gouvernement d’accorder un pardon a Robert Latimer. C’est le cas des Woodrow dont la fille travaille a la ferme des Latimer. Dans le reportage, Trina Woodrow temoigne de la souffrance de Tracy Latimer.

« Jamais dans toute l’histoire judiciaire canadienne, on n’aura vu autant de temoignages de sympathie a l’endroit d’un individu qui a ete trouve coupable d’avoir tue intentionnellement une autre personne. »

— Une citation de Benoit Giasson, journaliste

« Le mouvement d’appui a Robert Latimer inquiete cependant certains organismes qui representent les handicapes. » Ils souhaitent etre entendus lors de l’appel. Pour eux, cette affaire fait craindre que leur vie ait moins de valeur que celle d’une personne non handicapee. Ils ont peur de ne pas avoir les memes droits.

Selon maitre Guy Cournoyer, president de l’association des avocats de la defense :

« C’est clair que le jury aurait pu acquitter monsieur Latimer en decidant de prendre sur lui de ne pas respecter la loi et d’acquitter parce qu’il croyait que, dans les circonstances, il devait moralement acquitter. »

Le 18 juillet 1995, trois juges de la Cour d’appel de la Saskatchewan confirment la condamnation pour meurtre.

Le 30 octobre 1995, c’est aupres de la Cour supreme du Canada que les avocats de Robert Latimer deposent une requete en appel. Cette requete est accompagnee d’une petition de 17 000 noms remise a la Chambre des communes en faveur de Latimer.

Latimer aura droit a un second proces le 6 fevrier 1997 en raison d’abus de procedures et d’entrave a la justice de la part du substitut du procureur general aupres des candidats jures lors du premier proces. Il sera de nouveau condamne pour meurtre non premedite le 4 novembre 1997.

Le 6 mai 1999, Latimer retourne en appel de sa condamnation. En attendant la decision des tribunaux, il est remis en liberte sous cautionnement.

C’est finalement le 18 janvier 2001 que la Cour supreme du Canada rend son ultime verdict, qui ne change pas. Latimer est condamne a perpetuite sans possibilite de liberation conditionnelle avant 10 ans. Sa demande d’exemption constitutionnelle est rejetee par le plus haut tribunal du pays.

Robert Latimer estime avoir ete injustement traite

Au Telejournal du 8 mai 2008, Brigitte Bureau s’entretient avec Robert Latimer dans une entrevue exclusive.

Telejournal, 8 mai 2008

Dans les faits, Robert Latimer aura passe sept ans derriere les barreaux.

Au moment de l’entrevue, l’homme est en liberation conditionnelle depuis deux mois et passera les trois prochaines annees en maison de transition. Il revient sur les raisons de son geste.

Malgre deux proces en premiere instance, deux renvois a la Cour d’appel et deux a la Cour supreme, il estime avoir ete injustement condamne.

Les tribunaux ont toujours convenu que Tracy aurait pu beneficier de medicaments plus efficaces contre la douleur. Selon son pere, ces medicaments aggravaient ses crises d’epilepsie et l’empechaient de respirer.

C’est en decembre 2010 que Robert Latimer recevra sa liberation conditionnelle totale.

Euthanasie c. suicide assiste

Au Canada, la loi federale modifiant le Code criminel sur l’aide medicale a mourir est entree en vigueur le 17 juin 2016. La loi regit le suicide assiste et les soins en fin de vie par des regles strictes et les individus doivent repondre a certains criteres pour y avoir droit.

Dans le cas Latimer, on parle d’euthanasie et non de suicide assiste.

Quelques mois avant l’affaire Latimer, l’affaire Sue Rodriguez avait retenu l’attention et provoque le debat sur le suicide assiste.

L’affaire Latimer va plus loin que le cas Sue Rodriguez, parce que, contrairement a Sue Rodriguez, Tracy Latimer n’a jamais exprime sa volonte de mourir et que Sue Rodriguez etait en phase terminale de sa maladie.