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«Je pensais avoir parle avec 50 hommes sur Tinder, ils etaient 800»
Les algorithmes ont investi nos relations amoureuses. Judith Duportail, journaliste, a decrypte celui de Tinder.
Judith Duportail reste l’autrice de L’amour sous algorithme, publie le 21 mars.
L’histoire de L’Amour sous algorithme, c’est d’abord J’ai rencontre de Judith Duportail avec un homme qui lui confie : «Judith, je ne pourrais jamais tomber amoureux d’une fille rencontree dans Tinder !» Commence aussi pour une telle journaliste de 32 ans une quete reellement personnelle du fonctionnement de l’application de rencontre, de le rapport a l’amour et aux hommes. Avec 1 objectif, saisir De quelle fai§on les algorithmes ont investi nos relations amoureuses et selectionnent pour nous le partenaire ideal.
L’EXPRESS : quatre millions de personnes utilisent Tinder au monde. Comment expliquez-vous ce succes ?
Judith Duportail : Sean Rad, passionne d’informatique, a eu l’idee de creer Tinder dans un cafe. Une fille lui a souri, mais il n’a pas ose aller lui parler. Cela semble s’i?tre alors dit qu’il fallait creer une application Afin de aider les gens a s’aborder. Le succes de Tinder repose concernant une telle belle intuition, une bonne communication, et la peur traditionnelle et reellement repandue du rateau.
Dans votre livre, vous racontez que vous etes devenue accro a Tinder.
Et je suis loin d’etre la seule ! L’application fonctionne dans le principe de la reponse aleatoire : on ne sait gui?re si on a 1 match, qui nous a matches, quand on a une notification, de qui elle vient. Il faut se connecter pour le voir. Ces petites incitations font qu’on a tout moyen envie d’y retourner pour retrouver l’extase du debut, le frisson du match. Dans mon cas, Tinder vient aussi repondre a une absence de confiance et d’estime de moi, a l’impression de devenir une loseuse en amour. Au moment oi? J’me retrouve a avoir plein de matchs et plein de mecs qui m’ecrivent, je me dis que je me suis trompee. En fait, j’suis une star, j’suis desiree. Au debut, j’y crois vraiment, sans me rendre compte que c’est 1 mensonge, que i§a arrive a tout un chacun. Car en realite, les hommes matchent systematiquement l’integralite des filles.
C’est un des principes de Tinder de toujours susciter l’envie d’y revenir ?
Oui. Un mec dont j’habite tombee amoureuse sur Tinder m’a affirme, ‘je suis toujours tente d’aller voir quand il n’y a pas mieux en magasin’. De nombreux personnes paraissent accros a ce vertige des possibles, a ce vivier infini de personnes, et a cette idee qu’il puisse toujours exister quelqu’un de mieux. Pour ne que dalle arranger, Tinder ne cesse de t’envoyer des notifications et des messages quand tu arretes de te connecter. Mais a force de ne point vouloir se fermer de porte, on va finir dans un couloir. On va pouvoir passer a cote de sa vie tel ca.
Et pourtant, Tinder vous fait vous sentir particulierement seule. C’est paradoxal.
Quand je me sens seule, je deviens legerement folle concernant Tinder. J’ecris compulsivement a des hommes, je leur dis la meme chose a tous, dans une quete desesperee de parler a quelqu’un. Et meme quand je commence des histoires avec des hommes j’ai l’impression de la distance. C’est bien l’enjeu de votre livre, comprendre quel effet a Tinder concernant la rencontre, pourquoi quand je tombe amoureuse, l’intermediaire ne se tisse jamais completement. En medecine on parle d’la balance benefices/risques. Sur Tinder, en supprimant la peur du rateau, tu supprimes aussi cela fait la valeur d’une rencontre.
Qu’est cela fait la valeur d’une retrouve justement ?
C’est le risque pris qui donne de la valeur. Si mon regard croise celui de nous au metro, si je prends le va parfois le regarder et qu’il me sourit, la satisfaction va etre bien plus grande que celle tout d’un match dans Tinder ou je ne prends aucun risque.
En parallele de votre recit tres intime, votre livre reste aussi une enquete journalistique sur Tinder, notamment i propos des informations personnelles des utilisateurs, 802 pages dans ce cas. Qu’est-ce que contenaient toutes vos informations ?
J’ai recu un fichier PDF qui contenait le nom, mon age, le jour d’la creation du compte, celui ma derniere connexion, mon genre, le type d’hommes qui m’interesse, mes likes Facebook, mes photos Instagram, et l’integralite de les matchs et conversations. J’etais persuadee d’avoir parle avec 50 hommes. Au final, ils etaient 800.
Comment expliquez-vous cela ?
Depuis le webmaster qu’on croit etre web et celle qu’on reste vraiment. Dans le cas, je n’etais pas la meme. J’ai passe ma vie a critiquer nos gars qui copient collent des blagues, qui arretent de repondre du jour au lendemain. J’me suis rendu compte que je faisais exactement la meme chose. C’est juste que je l’oubliais. Un sociologue a confirme que notre comportement etait caracteristique. Les mecs se servent En plus en plus d’Internet et des reseaux sociaux comme tout d’un exutoire, ainsi, refoulent.
Au livre, je rencontre une fille qui s’appelle Berenice, la grande gagnante de votre jeu a les yeux. Elle reste magnifique, connait des codes, a beaucoup de followers, i§a a les bonnes fringues, les petits cheveux. Mais meme i sa place Tinder revele des choses assez sombres. Elle devient accro a le propre reflet, au nombre de matchs qu’elle recoit, i§a a votre esclave, se fait passer pour une prostituee pour voir jusqu’a combien les hommes seront prets a payer pour coucher avec cette dernii?re.
Le point de depart du livre reste de denicher ce score de desirabilite ou Elo score, une note attribuee a chaque utilisateur et tenue secrete via Tinder. Comment est-elle fabriquee ?
C’est une cote, un systeme de classement qui evolue en permanence. Au moment oi? tu matchais un profil tres cote, tu gagnais plus de points, ainsi, inversement. Cette note servait a matcher avec des personnes de ce ligue, qui ont des niveaux d’attractivite egaux : un excellent avec 1 excellent, un possible avec un moyen, ainsi, un moche avec un moche.
Vous parlez au passe. J’ai aussi semaine que la sortie de votre livre, Tinder a indique que votre Elo score n’etait plus utilise. On va pouvoir nos croire ?
Cela fait des mois que je leur pose des questions sur ce thi?me, et que je me fais envoyer sur les roses. Ils ont publie une note de blog pour dire qu’ils ne l’utilisaient plus. Pourtant, ils refusent le dialogue et aucune autorite ne peut aller verifier quoi que ce soit. Cela reste totalement opaque.